Qu’est-ce que la « levée de doute » ?
La «
levée de doute » est l’opération consistant à vérifier la matérialité d’un événement ayant provoqué le déclenchement d’une alarme : feu, intrusion, etc. Issue d’une circulaire du 30 mai 1997 relative aux activités de surveillance à distance, la levée de doute avait été insérée à la loi n°83-629 du 12 juillet 1983 modifiée, sous l’article 16-1. La loi est aujourd’hui codifiée et c’est sous l’article L. 613-6 du Code de la sécurité intérieure que la levée de doute est définie comme « un ensemble de vérifications (…) de la matérialité et de la concordance des indices laissant présumer la commission d’un crime ou délit flagrant (…) ».
Qui opère la « levée de doute » ?
Préalable indispensable à l’appel des forces de police, la levée de doute est traditionnellement opérée par une personne physique (dans la plupart des cas, un agent de sécurité) qui effectuera une ronde sur site et procèdera aux vérifications idoines qui attesteront du bienfondé, ou pas, de l’alarme reçue. La demande de « levée de doute » est effectuée par un opérateur de télésurveillance qui, à réception d’une alarme, va mettre en application les consignes reçues de son client. À ce stade, on a coutume de dire que l’action de l’opérateur est en mode binaire, autrement dit l’opérateur « fait » ou « ne fait pas ». À réception d’une alarme sur son écran, l’opérateur déclenche les actions qu’il s’est contractuellement engagé à mener : appeler les destinataires d’alerte pour qu’ils effectuent une levée de doute.
La « levée de doute vidéo », une avancée technologique.
Le progrès technique aidant, de plus en plus de télésurveilleurs proposent d’effectuer une prestation de « levée de doute vidéo ». à partir des images reçues des matériels vidéo équipant les sites protégés, l’opérateur de télésurveillance est appelé à vérifier le bien-fondé des alarmes reçues. L’opérateur effectue lui-même la levée de doute. Nous sommes alors loin du mode binaire rappelé ci-avant car, dans cette hypothèse, la réalisation d’une levée de doute vidéo par l’opérateur est beaucoup plus subtile. En effet, il ne s’agit plus de faire ou de ne pas faire mais d’interpréter les images reçues.Si les images montrent un état de flagrance évident, il n’y aura aucune difficulté pour appeler immédiatement les forces de police. Il conviendra cependant de conserver les images pour attester de la flagrance, images qui seront en tout état de cause sollicitées par les forces de police. Si en revanche, l’exploitation des images ne permet pas à l’opérateur de lever le doute (par exemple : mauvaise qualité des images transmises qu’il s’agisse d’un problème technique de définition ou encore de conditions météorologiques), alors le mode classique devra être maintenu : intervention sur site.Dans la pratique, de nombreux opérateurs classent « R AS » une levée de doute qui n’a manifestement pas levé le doute : soit que les images ne montrent rien ou qu’elles sont inexploitables en raison de leur mauvaise qualité, alors qu’une série d’alarmes intrusion a été reçue, soit que leur interprétation est erronée: passage furtif d’un camion, de piétons.
Il faut dire que dans la plupart des cas, les consignes données à l’opérateur sont lacunaires. Généralement conçues sur le mode binaire, les consignes ne prévoient que deux cas : la levée de doute négative et la levée de doute positive. Mais qu’en est-il de la levée de doute impossible ?
Le doute est défini comme l’état de quelqu’un qui ne sait que croire. Il manifeste un manque de certitude quant à la véracité d’un fait. La levée de doute doit pourtant permettre à l’opérateur d’atteindre un état de certitude quant à la réalisation de l’événement ayant conduit au déclenchement d’une alarme. Dès lors que le doute subsiste, la levée de doute vidéo ne peut logiquement être acquittée par un « RAS ».
C’est la raison pour laquelle il convient non seulement de former les personnels des stations de télésurveillance à ce nouveau métier dès lors que la mission des opérateurs inclura la levée de doute vidéo, mais également d’adapter les contrats de prestations et prévoir trois cas : levée de doute négative, levée de doute positive et levée de doute impossible.
Ghislaine Moulai
Docteur en Droit – Avocat au Barreau de Paris